Simone ROL-BERNABEU raconte !
Dans les années 45-50 Monsieur BERNABEU Manolico, et ses frères Vincent et Fredou prirent la relève et m’enchantèrent avec leur «ENTERREMENT de la SARDINE»
Les ORIGINES de l’ENTERREMENT de la SARDINE.
… »entierro de la sardina »….
Mais quelle est cette blague?
Voilà sûrement la question qui viendrait à l’esprit de nos jeunes compatriotes Pieds Noirs dont les parents Saladéens n’auraient pas évoqué ce singulier événement, concernant RIO et certainement d’autres villages.
Il s’agit en fait, d’un rite très ancien pratiqué encore de nos jours dans de nombreuses villes d’ESPAGNE avec énormément de faste.
A l’origine, dès l’avènement du Christianisme lorsque débutait le Carême le Mercredi des Cendres, une tradition consistait à enterrer de la viande symbole du péché et de la débauche.
Depuis, la religion catholique recommande l’abstinence : ne pas consommer de la viande en cette même période de l’année.
Mais alors quel est le rapport entre viande et sardine?
Là se trouve toute la subtilité de nos ancêtres. On suppose qu’au cours des siècles, la tradition se modifia quelque peu.
Le mot CERDO, qui signifie viande de porc en espagnol se prononce CERDA ou SERDINA, selon les différents dialectes de ce pays, pour devenir finalement au cours des ans SARDINA. Ne perdons pas de vue que les rites, les coutumes et les légendes de nos ancêtres se transmettaient autrefois de bouche à oreille de père en fils
Et c’est ainsi que ce rite à l’ origine religieux s’est transformé au fil des temps, en défilé carnavalesque, se terminant par l’incendie de l’effigie d’une gigantesque sardine.
« …..Notre village, particulièrement inspiré du folklore espagnol ne pouvait échapper à cette tradition. Elle a survécu chez nous, à RIO SALADO, jusqu’ aux années cinquante.
Malheureusement, il ne reste aujourd’hui que peu ou plus d’acteurs de cette époque. Mon père, Manolico BERNABEU, faisait partie de cette équipe.
Cet enterrement de la sardine était un vrai spectacle. Les participants étaient vêtus de noir. Ils se regroupaient en début d’après midi devant la villa de notre ancien maire, M. BERNARD, sur le boulevard national. Ils avaient auparavant récupéré la charrette remisée dans la cour du maréchal-ferrant Patricio ESCUDERO, qui avait la forge entre le magasin de légumes de Pépé le légumier et le Pénalty-Bar.
Un mannequin de chiffon représentant le mort était allongé dans la charrette tirée par les copains les plus costauds, car le chemin était long!!!
L’étrange corso démarrait après un : «ADELANTE!» lancé par l’imposant Basiolio QUARENTA qui faisait fonction d’agent de la circulation. Derrière le corbillard, mon père, travesti en curé, tenait en guise d’encensoir un pot à lavement émaillé d’où pendait une longue canule. Et tout au long du parcours, il bénissait les curieux.
Assisté de Pierrot GRAS, il tentait de consoler la veuve éplorée qui n’était autre que Manuel GARCIA, le molinero. Toute la famille vaudevillesque suivait, la tête recouverte d’un voile noir qui permettait de garder l’anonymat. Mais affublés de la sorte, nos joyeux lurons transpiraient à grosses gouttes. Léopold GRAS, Manuel SAEZ et tous ceux dont je n’ai pu retrouver les noms, devaient se « dévoiler » pour s’aérer….Adieu l’Anonymat!!!!
Pendant le déroulement de cette « joyeuse cérémonie funèbre », il était convenu de s’arrêter à chaque bar, devenant église pour la circonstance. L’église initiale était le café GATTI où la première anisette de consolation leur était offerte. Et il y avait 13 « églises » à Rio!!!!!!
Au terme de son périple, le cortège s’arrêtait sur la grande place du village, entre les deux jets d’eau. La foule des villageois, tout aussi réjouie que nos compères,
assistait au dernier acte de cette comédie.
La charrette et le mannequin étaient incendiés. Nos acteurs bénissaient le défunt en lançant dans le brasier…..des sardines salées qui embaumaient le village d’effluves qui n’avaient rien à voir avec l’encens.
L’odeur et la fin du spectacle faisait fuir tout le monde. Nos amis se retrouvaient au
» Grand Café » tenu à cette époque par Pierrot GRAS et mon père.
Ainsi s’achevait cette saga. Un copieux souper réunissait toute la troupe, dans une ambiance enjouée qui reflétait le bonheur de ces hommes heureux de vivre et d’avoir été, le temps d’une soirée, les acteurs d’un divertissement apprécié de tout un village. »
Après « l’enterrement de la sardine à RIO ».
Voici la participation de mon père au concours de travestis lors d’un bal masqué.
Réputé pour son tempérament enjoué, mon père Manolico Bernabeu , toujours disposé à
animer le folklore local, se prêtait volontiers à interpréter des rôles désopilants. Ainsi dans
la saga de l’enterrement de la sardine à Rio, il officiait travesti en curé suivant le « corbillard ».
Par ailleurs, lors d’un concours de déguisements présenté au cinéma Casino exploité par la famille Rocher, le 1er prix lui fut décerné pour un costume, confectionné par ma mère, représentant un personnage vêtu d’une tenue séparée verticalement en deux parties égales, l’une en habit féminin, l’autre masculin.
C’était là aussi, pour l’artiste qu’il était, une démonstration de son attrait pour la comedia del arte.
et tu te souviens , Simone, de ce mariage d’un soir de CARNAVAL, organisé par Jeannot PEREZ:
un couple de mariés, elle ou lui je ne sais plus, en robe blanche et ombrelle en dentelle, lui, en queue de pie et haut de forme, descendant le boulevard national, vers les 9h du soir, dans une voiture pas n’ importe laquelle, non, celle de M. CLAVERIE, vestige des années 30.
La noce arrivait devant la quincaillerie TISSINIÉ, tournait à droite direction le CASINO, accompagnée « d’invités », de curieux et par l’ inoubliable klaxon de cette voiture mémorable.
Ah! Ils savaient s’amuser, nos ainés!!!!!!
Qui pourrait encore nous en dire plus sur ce mariage d’ un soir de CARNAVAL?
Je me souviens seulement avoir apercu Jeannot PEREZ, vêtu d’une robe blanche avec une capeline assortie, dansant sur l’air de la cucaracha dans la salle du casino.
Je me rappelle aussi de Monsieur Corbalan portant un déguisement noir prés du corps, comme
celui des Frères Jacques, sur lequel était tracé un squelette phosphorescent. Il s’était présenté
dans la salle du casino, plongée sciemment dans l’obscurité, mimant une danse macabre.
A Rio-Salado il exerçait la profession de plombier et occasionnellement il jouait du saxophone.
Lors de notre exode en 62 il s’est expatrié à Benicarlo (Espagne) où il a exploité un bar avec
l’enseigne Rio-Salado . Il nous avait confié avoir réussi à ramener son instrument de musique
parmi ses rares affaires.
je n’ai pas d’autres souvenirs concernant les fêtes de carnaval
Simone ROL BERNABEU
Le carnaval de RIO
L’approche des fêtes de carnaval produisait une ambiance jubilatoire chez moi , liée à l’organisation de la soirée au Casino à laquelle mon père Manuel BERNABEU prenait une part
active. Déjà, un mois avant l’évènement, le soir des amis de mes parents se réunissaient dans notre maison pour répéter leurs interprétations.
Préalablement les enfants étaient tenus d’aller se coucher pour éviter de perturber les acteurs.
Je me souviens y avoir reconnu, le couple PARES, exploitant d’un bar au village, Rosette PAEZ
notre voisine, la famille MARTINEZ: Yolande, Eliane, Mireille, toutes celles-ci étaient des
tantes d’Yvico ANDREO.
Le jour J, imprégnés de leur rôles, les acteurs de ce divertissement s’investissaient pleinement.
Robert TITO, désigné porteur de notre drapeau tricolore, précédait le cortége carnavalesque
lors de son entrée au Casino, suivi des autres participants travestis.
C’est sur l’air d’un tube mexicain populaire « chiu, chiu, chiu, chiu, canta, canta pajarito » dont
les paroles avaient été modifiées et traduites en plagiat comique par mon père, que la joyeuse troupe arrivait sur scène. Alors la soirée débutait dans l’allegresse générale et nos amis saladéens gourmands de festivités, affublés de leurs déguisements, tourbillonnaient dans la salle se déhanchant au son de rythmes latinos. Et chacun retardera au plus tard possible
le moment de se séparer.
Merci Simone. Tu ajoutes un complément de poids à nos souvenirs de CARNAVAL. Je savais que ces soirées étaient mémorables pour nos parents. Mais, vu notre jeune âge, l’entrée nous était interdite. Aussi mes souvenirs se sont arrêtés aux portes du CASINO.
J’avais espéré que, comme toi, d’autres auraient pu enrichir notre « boîte à souvenirs » ce qui nous aurait permis de faire découvrir et vivre notre CARNAVAL à RIO.