1941-1945
Les enfants de monsieur Duchemin.
Aujourd’hui, nous ne ferons pas de balade dans RIO SALADO. Je vous parlerai d’un fait qui compta dans la vie de nos villages d’ ALGÉRIE dans les années 1940 .-1945.

C’est en fouillant dans nos archives, que j’ai retrouvé un échange de lettres avec celle qui fut la Présidente de L’ ECHO de L’ORANIE :
Madame Claude-Sandra RAYMOND.
Elle était à la recherche de documents « lui permettant de mettre en lumière l’œuvre des familles Pieds- Noirs, qui, de 1941 à 1945, ont recueilli des enfants métropolitains en ALGÉRIE et en TUNISIE ».
Puis-je rappeler à la jeune génération qui a la curiosité de nous suivre dans nos balades, que la FRANCE était en ce temps-là occupée par les Allemands. Les alliés venus en aide pour repousser l’envahisseur furent obligés de bombarder des villes comme Nantes .

Le lien ci-dessous, tiré de la une de Ouest-France, vous éclairera sur ce qui fut un terrible événement :
Mme RAYMOND racontait:
« A partir de l’ occupation allemande du Nord de la FRANCE, un certain nombre d’ organismes comme :
– la Croix Rouge Française, – le Comité Ouvrier de Secours Immédiat (COSI), – la Fédération des Amicales Laïques, – Le Secours National, – La Caisse Régionale des Institutions Ouvrières ( CRIFO),…
s’unissent pour prendre en charge les enfants des zones bombardées , et pour évacuer au titre de la défense passive les sinistrés, les orphelins ou plus simplement les enfants souffrants de malnutrition, pour les placer les uns dans la zone sud, d’autres dans les Alpes du Nord ou en Suisse, un nombre important en Algérie et en Tunisie .
Originaires du Nord bien sûr mais aussi d’autres régions, une partie de ces enfants qui ont entre trois, quinze ou seize ans, en particulier ceux qui partent pour l’ Afrique du Nord, sont regroupés, en complète coordination avec la Croix-Rouge, au sein du « Centre GUYNEMER « .»
Le Centre fut fondé par la vicomtesse VILLERS de la NOUE, sœur de Georges GUYNEMER, as de la première guerre mondiale abattu en septembre 1917. Les Centres GUYNEMER furent crées sous le patronage du Géneral PÉTAIN.

En 1941, les enfants de NANTES furent dirigés vers RIO SALADO.
Monsieur DUCHEMIN, violoniste sur un bateau de croisières, se trouvant sans travail, et Mme DUCHEMIN ,tous deux nantais d’ origine, furent sollicités pour accompagner et prendre soin de ces jeunes réfugiés dans notre village.
M. Albin ARNOUX mit à leur disposition des locaux situés près de la vieille école de filles, face à l’ église dans ce qui deviendra plus tard le studio-photos DUCHEMIN.

Les enfants étaient âgés de 7 à 14 ans. Le benjamin, Jean-Claude, devait être le neveu de M et Mme DUCHEMIN, d’après mes informateurs.
Ces enfants sont restés chez nous, jusqu’ en 1945.
Ils ne fréquentaient pas l’école communale. Ils vivaient en vase -clos, créant chez nous, enfants de 10ans, un malaise, voir même un mystère. Qui étaient ces enfants « enfermés dans ces locaux » qu’on ne voyait pratiquement jamais ?
J’eus la possibilité de les rencontrer. Je me souviens d’ être allée avec ma mère rendre visite à Mme DUCHEMIN, d’ entrer dans l’arrière salle, pratiquement obscure, où seule une porte donnait sur une cour intérieure.
Je revois une table très longue, tous les garçons assis, bras croisés ,et M.DUCHEMIN, en bout de la table . Que faisaient ils ? Je ne m’ en souviens pas. Mais je vous assure, : j’étais pressée de quitter les lieux.
Cécile RODRIGUEZ, la charmante amie de toutes les générations saladéennes confondues, me racontait que les gaillards n’étaient pas toujours faciles à tenir. Pour mater leur révolte, M. DUCHEMIN en désespoir de cause, les envoyait chez son père, Cécilio le coiffeur , lui donnant pour consigne, en guise de représailles, de leur raser le crâne.

M. RODRIGUEZ, compatissant, ne pouvait s’y résoudre . Les crânes rasés n’étaient pas à la mode à cette époque. Cécilio entamait alors des discussions sans fin, entremêlées de leçons de morale. Finalement, notre bon Cécilio se contentait d’exécuter une coupe très courte. Une chose est certaine, me disait Cécile, son père n’ eut pas beaucoup de crâne à raser. Tous les dimanches, afin d’ apporter un peu de fantaisie dans leur vie d’exilés, les enfants étaient invités chez des familles compatissantes. Mathilde DAVOS, et Yvette DETORRES , à qui je dois ces photos, ont accueilli ces exilés trois ou quatre enfants, jamais les mêmes, à venir passer le dimanche en famille.

Puis la guerre prit fin. Les garçons retrouvèrent leurs familles, et M et Mme DUCHEMIN décidèrent de rester dans ce village qui les avaient si bien accueillis. Mathilde n’eut pas le moindre petit mot de ces garçons. Yvette, plus chanceuse, reçut deux cartes postales de NANTES. Puis, le temps a passé et les souvenirs se sont estompés. Un seul mystère : pourquoi avoir garder ces enfants à l’écart des enfants du village ? Plus personne hélas! pour répondre à cette question. Etait-ce une consigne… un choix?

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